COMMENT L'UTILITE PUBLIQUE EST-ELLE APPRECIEE POUR UNE RESERVE FONCIERE ?
Tribunal administratif de Marseille, 6 avril 2023, n° 2008164.
La réalité d'un projet d'action ou d'une opération d'aménagement est-elle nécessaire pour la création de la réserve foncière ?
OUI - Certaines personnes publiques telles que l'Etat, les collectivités publiques et les établissements publics peuvent constituer des réserves foncières par la voie de l'expropriation, si elles prouvent la réalité d'un projet d'action ou d'une opération d'aménagement qui poursuivent les objectifs de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme.
Le tribunal administratif de Marseille n'a pas manqué de le rappeler dans sa décision du 6 avril 2023 au sujet d'une zone située dans la rue d'Aubagne. A la suite d'effondrements d'immeubles en 2018, le préfet de la Bouches-du-Rhône a déclaré d'utilité publique, la création d'une réserve foncière au profit de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) mais cette décision a été contestée par des copropriétaires devant le juge administratif.
Ce dernier, en se référant à l'article L. 221-1 du code de l'urbanisme, a précisé que les personnes publiques mentionnées doivent démontrer la réalité d'un projet d'action ou d'une opération d'aménagement, à la date à laquelle la procédure de la déclaration d'utilité publique est engagée, même si les caractéristiques dudit projet ne sont pas précisément déterminées.
En l'espèce, le programme consistait à lutter contre l'habitat insalubre et dangereux, par le renouvellement urbain et la création d'équipements publics dans le centre-ville de Marseille.
Par conséquent, à la date à laquelle la procédure d'utilité publique était entamée, l'établissement public foncier avait prouvé la réalité du projet d'aménagement.
La déclaration d'utilité publique est-elle indispensable avant la constitution de la réserve foncière ?
OUI - L'utilité publique est liée à la notion d'intérêt général. Pour apprécier la validité d'une déclaration d'utilité publique avant une opération qui implique l'expropriation d'immeubles, le juge administratif doit examiner plusieurs conditions :
- L'existence d'un intérêt général
- L'impossibilité de faire l'opération sans procéder à l'expropriation
- La proportionnalité des atteintes à la propriété privée, le coût financier et les inconvénients d'ordre social ou économique avec le but d'intérêt général
- Le rapport entre l'intégration d'une parcelle dans le périmètre de l'expropriation et l'opération déclarée d'utilité publique
Le tribunal administratif a retenu l'intérêt général de renouvellement urbain que poursuit le projet de l'établissement public foncier.
En outre, après un contrôle de proportionnalité, le juge a estimé que les conséquences liées à la création de la réserve foncière n'étaient pas excessives au regard de l'intérêt général poursuivi par l'opération.
Cependant, concernant la nécessité de l'expropriation, la juridiction a énoncé une précision.
Les travaux engagés par des particuliers peuvent-ils rendre l'expropriation, par une personne publique, inutile ?
NON - Dans l'affaire traitée par le tribunal administratif de Marseille, les requérants avaient entamé des travaux de réhabilitation sur les biens destinés à être expropriés ce qui justifiait, selon eux, l'inefficacité de l'expropriation. Il aurait donc été possible de réaliser les rénovations sur les immeubles endommagés sans que l'établissement public foncier PACA procède à l'opération.
Néanmoins, le juge administratif n'a pas suivi ce raisonnement en estimant que ces travaux commencés par les particuliers n'auraient pas pu permettre d'atteindre les objectifs identiques à ceux poursuivis par l'opération d'aménagement de la personne publique.
Conséquemment à cette position, la création de la réserve foncière devait nécessairement s'accompagner d'une déclaration d'utilité publique et de l'expropriation qui en est le prolongement, et cela, en dépit des travaux engagés par les copropriétaires.
Retrouvez nos autres actualités sur le thème de l'urbanisme et de l'utilité publique :
COMMENT LE JUGE ADMINISTRATIF APPRECIE-T-IL LA DECISION DE PREEMPTION ?
Dans le cadre du contentieux relatif au droit de l'urbanisme, le Cabinet Lapuelle est là pour vous accompagner.
Vous pouvez également trouver de nombreux modèles de courriers, notes juridiques et guides en matière d'urbanisme, qui sont à votre disposition sur le site https://www.lapuelle-juridique.com/.
Pour toutes autres questions, vous pouvez contacter le cabinet d'avocats ou prendre rendez-vous en ligne !
Maître Clémence LAPUELLE - 38 rue Alsace-Lorraine - 31000 TOULOUSE - Tél. : 05 61 38 27 17 - Mail : lapuelle@cabinetlapuelle.com
Cette actualité est associée aux catégories suivantes : Droit de l'urbanisme
- septembre 2024
- août 2024
- juillet 2024