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QUELLES SONT LES CONDITIONS POUR QU'UNE DIA PERMETTE LA PREEMPTION ?

QUELLES SONT LES CONDITIONS POUR QU'UNE DIA PERMETTE LA PREEMPTION ?
Le 08 mai 2023
Le Conseil d'Etat a énoncé des règles sur les conditions pour qu'une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) soit recevable, notamment au regard de la propriété du bien, objet d'une décision de préemption par une collectivité territoriale.

Quels étaient les faits en l'espèce ?

Le Conseil général de Guyane a adopté une délibération en date du 10 septembre 2010, dans laquelle il a validé la vente, à M. B, de la parcelle cadastrée n° AS 1705, à détacher d'un terrain situé sur le territoire du département. Néanmoins, le détachement n'a eu lieu qu'en 2014 car le département de Guyane (devenu la Collectivité territoriale de Guyane) était en désaccord avec le prix consenti en 2010 qui lui semblait très inférieur par rapport à sa véritable valeur.

Plus tard, une première déclaration d'intention d'aliéner (DIA) émanant de la Guyane, a été adressée à la commune de Rémire-Montjoly, alors titulaire du droit de préemption, le 15 novembre 2016 mais la collectivité a refusé d'exercer son droit de préemption.

Il a fallu un jugement du 25 janvier 2021 pour que le tribunal judiciaire de Cayenne, saisi par M. B, déclare la vente de la parcelle cadastrée n° AS n°1705, parfaite à son profit.

Toutefois, une deuxième DIA, prise le 5 août 2021 et identique à la première, a été envoyée à la commune de Rémire-Montjoly qui a décidé, cette fois, d'exercer son droit de préemption sous la forme d'un arrêté du 4 novembre 2021. Devant ce conflit de propriété, M. B a contesté cet arrêté devant le juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative. Son référé-suspension a cependant été rejeté car le jugement du tribunal judiciaire de Cayenne n'était pas revêtu de l'autorité de la chose jugée. Ce dernier argument, avancé par le tribunal administratif, a été démenti par le Conseil d'Etat mais la décision de la Haute-juridiction est bien plus riche que ce seul élément.

La condition de l'urgence est-elle, en principe, remplie en cas de décision de préemption ?

OUI - L'arrêt du Conseil d'Etat rendu le 1er mars 2023, n°462877, a annulé l'ordonnance du tribunal administratif de Guyane en date du 15 février 2022, n°2200062. A l'occasion de cette annulation, la Haute-juridiction a rappelé quelques règles applicables en droit de préemption. D'abord, lorsque le juge des référés est saisi d'un référé-suspension, il lui appartient de vérifier deux conditions : l'urgence et un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

Concernant la première condition, le Conseil d'Etat rappelle que l'urgence est réputée remplie en cas de décision de préemption, ce qui n'est pas surprenant puisque le droit de propriété, prérogative imprescriptible et sacrée, risque d'être bafouée par une décision administrative. Néanmoins, une réserve est précisée par le juge administratif. Si le titulaire du droit de préemption justifie de circonstances particulières en raison, par exemple, de la réalisation rapide d'un projet qui ne peut se concrétiser que par l'acquisition de propriété de ce bien, l'urgence peut être écartée par la juridiction. C'est le juge des référés qui exerce son pouvoir discrétionnaire pour apprécier toutes les circonstances de l'espèce.

Il ressort des pièces du dossier que la commune de Rémire-Montjoly ne revendiquait aucune réalisation d'un projet présentant un intérêt pour la collectivité. 

Par conséquent, la condition de l'urgence était satisfaite. Venons-en à la deuxième condition nécessaire à la validité d'un référé-suspension, à savoir un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. 

La renonciation à exercer son droit de préemption une première fois empêche-t-elle d'y avoir recours une seconde fois ?

NON - En se reportant sur les articles L. 213-2 et L. 213-8 du code de l'urbanisme, le juge administratif a estimé que la réception d'une DIA par le titulaire du droit de préemption, alors qu'il y avait renoncé une première fois lors de la réception d'une précédente déclaration, ne fait pas obstacle, une nouvelle fois, à l'exercice de cette prérogative. Il faut que la deuxième DIA concerne la vente du même bien par la même personne et présente les mêmes conditions que la déclaration précédente. En outre, l'exercice du droit de préemption doit être fait dans un délai de deux mois à compter de la réception de la deuxième DIA.

Après un examen de l'espèce, la commune de Rémire-Montjoly pouvait invoquer son droit de préemption, quand bien même elle y aurait renoncé en 2016. 

En partant de cette argumentation, l'arrêté semblait valide au regard du droit en vigueur. Mais la règle de la propriété est un élément indispensable pour qu'une DIA soit légale.

L'auteur d'une déclaration d'intention d'aliéner doit-il être le propriétaire du bien à la date à laquelle il émet la décision ?

OUI - Cette règle est évidente mais elle n'a pas empêché la Collectivité territoriale de Guyane de prendre une seconde DIA dans les mêmes conditions que la première.

En se reportant sur les articles précités du code de l'urbanisme, le Conseil d'Etat a considéré que le titulaire du droit de préemption ne peut pas légalement l'exercer si l'auteur de la DIA n'est pas propriétaire du bien, le jour où il prend cette décision. 

En l'espèce, la vente consentie par la Collectivité de Guyane pour M. B., a été jugée parfaite par le tribunal judicaire de Guyane dont les jugements bénéficient de l'autorité de la chose jugée. La Guyane, auteure de la seconde DIA, n'était donc plus propriétaire de la parcelle cadastrée, le 5 août 2021.

En définitive, l'arrêté de préemption pris par la commune était illégal ce qui justifiait une suspension de la décision.

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