QUELLES SONT LES CONSEQUENCES DE LA HAUSSE DES PRIX DES MATIERES PREMIERES ?
Conseil d'Etat, Avis, 15 septembre 2022, n°405540
Le gouvernement avait interrogé le Conseil d'Etat sur les conséquences de l'explosion des prix des matières premières sur les contrats de la commande publique, et plus précisément sur les marchés publics et les concessions.
Il souhaitait notamment connaître les possibilités de modification "sèche" des clauses financières des contrats, ainsi que l'application de la théorie de l'imprévision.
Quelles sont les possibilités de modification contractuelle en cas de hausse des prix des matières premières ?
Le code de la commande publique contient plusieurs dispositions aux termes desquelles il est possible de demander à une autorité concédante ou à un pouvoir adjudicateur la modification de certaines clauses du contrat.
Le Conseil d'Etat précise cependant dans son avis que l’usage de ces mécanismes de modification contractuelle n'est qu’une possibilité pour la personne publique, et non une obligation.
Il précise également que les modifications ne peuvent porter que sur les prix, ou encore sur la durée du contrat (modification dite "sèche"), sans nouvelle procédure de mise en concurrence.
Les modifications peuvent être justifiées sur plusieurs fondements, dont des :
- Modifications justifiées par des prestations supplémentaires (article R. 2194-2 et suivant, et R. 3135-2 et suivant du code de la commande publique) : il s'agit de la situation dans laquelle des travaux ou services supplémentaires ne figurant pas dans la convention initiale sont devenues indispensables à l'exécution du contrat ;
- Modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévues (article R. 2194-5 et R. 3135-5 du code de la commande publique) : cela correspond à l'hypothèse où survient un évènement extérieur qu’une personne publique ne pouvait pas prévoir; la modification ne pouvant excéder un montant supérieur à 50% de la convention initiale ;
- Modifications non substantielles (article R.2194-7 et R.3135-7 du code de la commande publique) : il est possible de modifier un contrat de la commande publique en cours d’exécution, à condition que de telles modifications ne soient pas substantielles (par exemple, qu'elles n'élargissent pas le champ d'application du contrat ou contournent les règles de publicité et de mise en concurrence) ;
- Modifications d'un faible montant (article R. 2194-8 et R.3135-8 du code de la commande publique) : il existe une présomption de régularité en cas de modifications portant sur un faible montant, mais elles doivent être justifiées et proportionnées aux objectifs suivis, et ne doivent pas avoir pour conséquence de changer la nature globale du contrat.
Comment appliquer la théorie de l'imprévision en cas de hausse des prix des matières premières ?
L'imprévision est une théorie pouvant se définir comme la survenance d'un évènement imprévisible, extérieur aux parties et bouleversant l'économie du contrat (Conseil d'Etat, 30 mars 1916, Compagnie générale d'éclairage de Bordeaux, n°59928, Conseil d'Etat, 21 octobre 2019, Société Alliance, n°419155).
Ainsi, l'augmentation du prix des matières premières peut être à l’origine d’un bouleversement économique, qualifié d’imprévision et pouvant donner lieu à une indemnité, dès lors qu’elle n’était pas prévisible au moment de la conclusion du contrat.
Il faut toutefois que l'opérateur subisse un véritable déficit, et non un simple manque à gagner.
Dans son avis du 15 septembre 2022, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de préciser que le cocontractant est dans l'obligation de poursuivre l'exécution de son contrat afin de prévoir une indemnité pour imprévision.
Le Conseil d'Etat précise également que ce droit à indemnisation extracontractuel est indépendant de toute demande de modification du contrat, le titulaire d'un marché ou le concessionnaire pouvant ainsi demander le bénéfice des deux mesures.
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