Résiliation d'une DSP : La continuité du service public n'a pas dit son dernier mot.
Dans un arrêt du 19 décembre 2014, le Conseil d'Etat poursuit son ascension vers un "nouveau procès administratif". Dans le cadre d'une résiliation de délégation de service public, il est consacré la substitution de plein droit de la personne publique à son ancien cocontractant pour l'exécution des contrats conclus avec les usagers, sous réserve que les contrats en cause ne comportent pas d'engagements anormalement pris.
A l'instar des jurisprudences Commune de Béziers I et II, Tropic Travaux Signalisations, et désormais Département Tarn et Garonne, l'office du juge administratif est renforcé. Le pouvoir d'appréciation du juge du contrat veille en particulier à préserver les intérêts des cocontractants et des usagers du service public, et adapter les solutions aux circonstances d'espèce.
Aux termes de l'arrêt du 19 décembre 2014, le Conseil d'Etat aménage le principe selon lequel la résiliation des contrats de délégation de service public ne peut être prononcée que dans la mesure où elle ne porte pas une atteinte excessive à l'intérêt général. Il confirme en particulier la prégnance du principe de la continuité du service public, en affirmant la substitution de plein droit de la personne publique à son ancien cocontractant pour l'exécution des contrats conclus avec les usagers ou avec d'autres tiers.
Dans les faits, il est mis en cause les conséquences pour les usagers du service public d'une résiliation d'une convention de délégation de service public portant sur la construction et l'exploitation du port de plaisance de la commune de Propriano, confiée à la société Yacht club international de Valinco.
Un usager du port de plaisance a saisi le tribunal administratif de Bastia, tendant à ce que la commune soit condamnée à l'indemniser du préjudice né de l'inexécution du contrat de garantie d'usage d'un poste d'amarrage de longue durée. En cassation, la commune de Propriano se pourvoit contre l'arrêt du 5 mars 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal et fait droit à la demande de la requérante. Un pourvoi confirmé par le Conseil d'Etat.
La Haute juridiction administrative reconnait dès lors que "sans préjudice des dispositions législatives applicables notamment en matière de transfert de contrat de travail, qu'en cas de résiliation d'un contrat portant exécution d'un service public, quel qu'en soit le motif, la personne publique, à laquelle il appartient de garantir la continuité du service public et son bon fonctionnement, se substitue de plein droit à son ancien cocontractant pour l'exécution des contrats conclus avec les usagers ou avec d'autres tiers pour l'exécution même du service".
Cependant, la substitution de la personne publique à son ancien cocontractant ne peut être mise en oeuvre "que si les contrats en cause ne comportent pas d'engagements anormalement pris, c'est-à-dire des engagements qu'une interprétation raisonnable du contrat relatif à l'exécution d'un service public ne permettrait pas de prendre au regard notamment de leur objet, de leurs conditions d'exécution ou de leur durée, à moins que, dans ce cas, la personne publique n'ait donné, dans le respet de la règlementation applicable, son accord à la conclusion".
En l'espèce, le juge administratif consacre le principe sans y faire application. En effet, l'exécution du contrat de garantie d'usage d'un poste d'amarrage de longue durée, dont se prévaut l'usager, ne peut être regardé comme un engagement normalement pris, et le cas échéant permettre la substitution de la personne publique.
Ainsi, dans une jurisprudence constante, le Conseil d'Etat rappelle que les conséquences sur les usagers d'une résilitation d'une convention de délégation de service public sont appréciables sous l'office du juge du contrat et ne peuvent méconnaitre la continuité du service public.
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