Revirement de jurisprudence : société entreprise Peyrot
Le Tribunal des Conflits, par sa décision en date du 9 mars 2015, abandonne sa jurisprudence Société entreprise Peyrot du 8 juillet 1963. Une société concessionnaire d'autoroute est désormais considérée comme agissant pour son propre compte. Les conflits relatifs à l'exécution de la convention conclue avec une autre personne privée relèvent dès lors de la compétence des juridictions judiciaires.
Dans le cadre des obligations faites aux sociétés concessionnaires d'autouroutes de consacrer une part du montant des travaux de construction d'une liaison autoroutière à des oeuvre d'art, la société ASF a conclu le 23 avril 1990 avec une sculptrice un contrat lui confiant la réalisation de trois esquisses. L'implantation des sculptures devait se réaliser sur une aire de service de la future autoroute A89. Cependant, après l'achèvement des travaux de construction des ouvrages autoroutiers, la société ASF a décidé d'abandonner le projet sculptural.
Mme R a saisi la Cour de cassation d'une demande d'indemnisation des préjudices subis du fait de la résiliation du contrat considéré. Par arrêt du 17 février 2010, la Cour de cassation a décliné la compétence du juge judiciaire. Par suite, la requérante s'est tournée vers la juridiction administrative. Par arrêt du 21 octobre 2014, la cour administrative d'appel de Paris, estimant que le litige relevait de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, a saisi le Tribunal des Conflits.
Dans le prolongement d'une jurisprudence récente (TC, 9 juillet 2012, Cie générale des eaux c/ Ministère de l'écologie et du développement durable), le Tribunal des Conflits consacre que les sociétés concessionnaires d'autoroute ne sont plus considérées comme agissant pour le compte de l'Etat, mais pour leur propre compte.
"Une société concessionnaire d'autoroute qui conclut avec une autre personne privée un contrat ayant pour objet la construction, l'exploitation ou l'entretien de l'autoroute ne peut, en l'absence de conditions particulières, être regardée comme ayant agi pour le compte de l'Etat".
Il en résulte que les contrats conclus entre les sociétés concessionnaires d'autoroute et une autre personne privée relèvent d'une nature de droit privé. "Les litiges nés de l'exécution de ce contrat ressortissent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire".
De surcroit, ce revirement de jurisprudence s'exerce dans le cadre d'une modulation dans le temps. Seuls les litiges nés des contrats conclus postérieurement au revirement du 9 mars 2015 relèveront de la compétence judiciaire. En l'espèce, le juge administratif reste compétent.
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